Une nouvelle ère à l’horizon
Limp Bizkit – Korn – P.O.D – Urban dance squad – Ill Niño – Crazy Town Woodstock ’99
Édito
Deuxième moitié des années 90, c’est l’explosion de ce crossover ROCK/RAP, mais c’est surtout la naissance du sous-genre Numétal appelé aussi Néo métal. Avant toute chose, il est essentiel de rappeler que pas tous les groupes étiquetés Néo métal ont fait du ROCK/RAP. C’est pour cela que si vous pensez à certains groupes par exemple Staind ou Cold ou autres, vous ne les retrouverez pas dans cette 3e partie ni dans la suivante. Le Néo métal est un sous-genre de métal alternatif dont certains qui en ont fait partie ont pratiqué un genre mélangeant ROCK/RAP. Il était important de clarifier cela car certains groupes de musiques auraient pu facilement semer la confusion. Les choses sont claires, commençons !
Dans la partie 1 de ce dossier nous mentionnions l’importance qu’avait eu un groupe comme Sugar Ray anciennement Shrinky Dinx comme étant le ou l’un des groupes étant aux racines du néo-métal. Souvenez-vous à l’époque nous parlions de crossover entre le rock et le rap, mais le terme néo métal n’existait pas encore. L’album Lemonade and Brownies nous donnera les prémisses d’artistes par exemple ; Kid Rock.
Limp Bizkit est fondé en 1994, mais c’est en 1997 que le premier album Three Dollar Bill, Y’all voit le jour. Le genre Néo metal déjà implanté en grande pompe par Korn reprends un gros coup de boost avec ce premier album de Limp Bizkit. La fusion commence à faire son chemin commercialement et se diffuse de la manière la plus simple qui soit, d’un côté, la touche rock, de l’autre côté, le rap. Nous verrons que dans les années 2000 la mutation s’enclenchera tout doucement vers quelque chose de différent.
LB est arrivé avec quelque chose de nouveau, mais néanmoins le groupe n’explose pas les compteurs. Il faudra attendre la fin des années 2000 avec le 2e album ; Significant Other pour voir du LB partout où ce qu’on aille, le groupe était juste partout et la casquette rouge de Fred Durst était tout aussi populaire que le M de Mc Donald.
Counterfeit extrait de album Three Dollar Bill, Y’all. Un des premiers succès commerciaux du groupe.
Fred Durst , les deux pieds dans son époque
Juste après le 1er album de Limp Bizkit, Fred Durst était totalement conscient de l’impact du rap dans le rock. Le néo métal était en train d’exploser mais le crossover entre le rap et le rock se pratiquait déjà depuis les années 80, comme nous l’avons démontré dans l’épisode 2 de ce dossier. À voir dans cette vidéo de Rock Feed
Korn
Néanmoins, la deuxième partie des années 90 est marquée par la sortie d’un album qui fera beaucoup de bruit, du fait de son originalité musicale, le premier album de Korn (1994).
Groupe californien, Korn est fortement inspiré par la culture rap et mets en lumière ce crossover qui prend de plus en plus d’expansion. À la base certains membres du groupe sont issus dans d’autres formations très inspirées de ce que l’on a vu dans la partie 2, un genre de mélange entre le rock et le funk très inspiré de Faith No More, Living Colour et bien sûr les Red Hot Chilli Peppers qui commercialement avait explosé aux oreilles de tous.
L’un des musiciens, Head (guitare) expliquera dans Rolling Stones que le groupe était entre Ice Cube et Pantera. Justement, en 1998 on retrouvera Korn sur l’album Ice Cube ; War and Peace – Volume 1 (War & Peace, Volume 1: The War Disc). Korn nous présente une musique ou les sont truffées d’effets, saccadées, comme si elles étaient samplés et scratchées et ajouté à cela, le côté hyper 80’s du chanteur Jonathan Davis avec un chant très émotionnel proche de Duran Duran, Tears For Fears ou encore The Cure. Ceci allait donner quelque chose de vraiment spécial ; Korn, unique en son genre pour l’époque.
Tournée – House of Pain/Biohazard/Korn – Octobre 1994
Afin de promouvoir la sortie de leur premier album éponyme, la formation californienne part sur les routes pour leur toute première tournée en compagnie d’House Of Pain et Biohazard. Bel exemple de mariage des genres entre un groupe de rap, un groupe de néo-metal et un groupe hxc pratiquant ce crossover ROCK/RAP.
P.O.D. – Alive
Basé en Californie, le groupe est formé en 1992 et sortira son premier disque en 1994. La formation fait partie des fondamentaux ROCK/RAP avec néanmoins une touche de reggae. Les californiens de POD remportent un grand succès à la sortie de leur 3e album The Fundamental Elements of Southtown, grâce au succès de la chanson ; ALIVE.
Saliva
Formation originaire de Menphis, Tennesse qui explose tout avec son 2e album Every six seconds sorti en 1997. Le single Click Click Boom et le video clip en boucle sur MTV popularisera le groupe. Saliva fait partie de l’envolée populaire du genre Numétal, mais version radio edit.
L’unicité d'(Hed)pe
La formation californienne reste pour moi mon groupe préféré de cette période. Autant le côté très pop d’Hedpe dû à leurs signatures en maison de disque dès le début et également la radicalisation du groupe dès le 4e album Only in Amerika. Libéré des maisons de disques, le groupe trouve son identité et s’éloigne de plus en plus de ce carcan Numétal que l’on retrouvait dans beaucoup de groupes de l’époque (Ill Nino, POD, Crazy Town) et j’en passe et des meilleurs. Only in America est encore empreint du travail fournis sur Broke et Blackout, c’est plus à partir de Back 2 Base X que le groupe se retrouve une identité.
Urban Dance Squad (EU)
Pendant ce temps-là en Europe ça s’activait pas mal dans le genre ROCK/RAP. Je me souviens avoir vu ce groupe originaire des Pays-Bas en concert dans ma ville du sud-est de la France et d’avoir pris une énorme claque.
Cypress Hill – Black Sunday
1994, la même année Cypress Hill sort son 2e album totalement lunaire; Black Sunday. Cypress Hill est un groupe de gangsta rap californien de Los Angeles, mais musicalement la formation est lunaire et elle le prouve avec ce deuxième album qui s’enracine beaucoup plus dans l’identité du groupe. Si le premier album éponyme du groupe sonnait très année 80, fin d’un enchevêtrement de Break beat, le 2e est l’album réalisé à la sortie de la salle du temps. Comme je l’expliquais dans l’édition précédente, Cypress Hill a déjà un pied dans le rock et le métal car le groupe monte sur scène avec des groupes de rap, se retrouve en bande originale dans des vidéos de skate et on le vérifiera par la suite avec leurs albums Skull & Bones ou la partie Bones et ROCK/RAP. Dans les années 80, les publics Rap et Rock ne se mélangeaient pas trop, mais Cypress Hill était fortement apprécié par les fans de métal bizarrement.
Extrait du Cd Bones de l’album Skull & Bones de Cypress Hill. les guitares sont assurées par Dino Cazares, membre de Fear Factory et d’autres groupes de métal.
1995 et les sorties rap
En cette deuxième partie des années 90 et principalement en 1995 c’est aussi là que Tupac sort son 2e album Me agiainst the world, album teinté d’une Soul incroyable et d’une plume super intimiste et intelligible. Loin du tourbillon Suge Knight, des Bloods et du rythme de vie déboussolant, cet album est le dernier album de Tupac, celui de sa première vie. Vulnérable, mature, Motown, adulte, avant-gardiste. Malheureusement cet album portait le nom de sa deuxième vie, la plus courte et la plus intense. C’est justement après ce 3e album que Tupac ne sera plus Tupac Shakur, celui de Baltimore et des cours de théâtre. Son amour de l’écriture se transformera en quelque chose de très loin de sa personne et il deviendra un individu complètement perdu qui prêtera allégeance à Suge Knight et s’enlignera dans une direction musicale vachement moins intéressante que tout ce qu’il a fait entre 1988 et 1995.
1995 toujours, ODB sort son premier album ; Return to the 36 chambers : The dirty version et nous découvrons enfin le premier album de Bone Thugs N Harmony, E. 1999 Eternal. Déferlante complète de différents genres rapologiques, le rap assume son identité, les productions fusent, se distançant un peu des gros enchevêtrements de beats à la Bomb Squad, le rap se raffine et se diversifie, tout cela mélangé à un accroissement du genre Nu métal et de fameux crossover.
Bone Thugs-N-Harmony est le côté dark
1995, je me souviens avoir saigné ce premier album de la formation originaire de Cleveland Ohio. BTNH fait de la mort son fil rouge et autant leurs vidéos que leurs apparences, que leurs musiques, est sombre. Nous ne sommes ni à Ny ni à Los Angeles et d’autres villes commencent à se faire entendre dans le monde rap aux États-Unis.
Incubus, Deftones, un autre numétal
Incubus et Deftones sont deux groupes très importants de la deuxième partie des années 90, mais surtout des années 2000. Sur ces deux premiers albums, Incubus trainait des miettes de Faith No More, Fishbone, Bad brains avec cette touche saturée nu métal, de leurs époques. Je trouve que ce que le groupe a essayé sur ces deux premiers albums a été moins réussi que certains groupes comme Hedpe qui dès le début de leurs carrières ont réussi à trouver leur voie. Incubus est fougueux et tente tout un tas de choses, mélangeant des percussions à un riff palmute très métal, revenant sur un passage à la George Clinton, au moins l’éclectisme est là, mais c’était quelques fois brouillon.
Octobre 1999, Incubus sort Make Yourself et la claque est assez brutale car le groupe à prit le temps de ranger sa chambre et de placer ses cartes une à une. Cette maturité se confirmera sur le 5e album Morning View sorti en 2001.
Fuir le Numétal afin de survivre
Incubus et Deftones ont fait partie de cette scène Numétal, mais en ont déguerpi assez vite. Gardant toujours un côté hip-hop par l’emploi des scratchs, des samples, des rythmes groovy et un certain chant parsemé à certains moments, les deux groupes se tracent très vite leurs propres voies avec leurs propres styles se détachant de toutes étiquettes. La preuve, leurs albums respectifs depuis les 15 dernières années sont uniques en leurs genres.
Deftones
Je dois vous aviser tout de suite que je pourrais parler de Deftones pendant minimum 300 pages et que de réécrire l’histoire du groupe serait une partie de plaisir.
Sautons tout de suite à l’album White Pony ou Deftones franchit un cap. Ce n’est plus le groupe Numétal californien de base qui a une attitude hip-hop et crie dans un micro comme 1000 de ses confrères. Beaucoup de journalistes et critiquent écriront et écrivent encore aujourd’hui sur cet album pour essayer de le disséquer et de le comprendre tant bien que mal. Il marquera le décollage pour le groupe vers une identité plus assumée.
Deftones tout comme Korn sont très inspirés de groupe comme Faith No More ou encore Living Colour ou Red Hot Chilli Peppers mais du fait des goûts particuliers du chanteur Chino Moreno (The Smiths, Smashing Pumkins, The Cure, Portishead), la musique du groupe deviendra très vite unique.
7 words – extrait de leur premier album Adrenaline
Change (In the House of Flies)-Deftones-White Pony
La scène française
Le rap, ça réactualise toutes les musiques (Kool Shen, NTM).
En ce qui concerne ce fameux crossover, la France n’y fait pas exception, mais il faudra attendre l’explosion de Limp Bizkit, Korn, pour voir apparaître tout un tas de groupe fortement influencé par ces derniers. À la volée ; Pleymo, Watcha, Silmaris seront les représentants de ce genre.
1999, Pleymo arrive avec son 1er album Keçkispasse? Fortement inspiré de tous les groupes américains étant sortis durant la décennie. Pleymo s’inspire de la musique Jungle et trifouille dans les effets pour nous sortir un crossover fortement inspiré de groupe comme The Union Underground, Powerman 5000 avec une touche rap découlant de Limp Bizkit. Dans l’imagerie, Pleymo tape en plein dans la culture japonaise. Le chanteur Mark Maggiori sera l’auteur de tous les visuels hallucinants du groupe parisien. 2e album, Medecine Cake, le groupe évolue, signe chez un plus gros label et réalise son rêve, celui d’aller tourner au Japon. Mon album fétiche, sera le 3e intitulé ; ROCK, plus aéré, plus mature, plus assumé voir plus pop, comme une volonté de se démocratiser, ce qu’a fait le rap tout au long de sa longue marche et ce qui fait qu’aujourd’hui, il est au top.
Silmaris – Court vite
1995, la France découvre ce groupe parisien survitaminé présente un crossover entre rap et rock, entre Led Zep et Beastis Boys, fortement inspiré des groupes fusion plus funky comme Red Hot Chillip Peppers ou encore Living Coulours. Silmaris c’était l’énergie de la Mano Negra avec la rage d’NTM saupoudré de Pop pour faire passer le sandwich.
Watcha
La formation parisienne, très proche de Pleymo, Enhancer, Aqme, reste l’un des groupes précurseurs de ce crossover en France. Mélangeants rythmes funky, passages jungle mélanger à un métal lourd et groovy, Watcha représentait un mariage des genres des plus délicieux.
Point sur une antiscène Numétal, plus radicale
Là ou des groupes comme LB, Korn ou Crazy Town proposaient une sorte de métal popisé rap, tout comme le pratiquaient Pleymo, Aqme ou encore Kells, une scène plus dure existe depuis le début des années 90 celle du HxC. Les groupes s’y raccrochant pratiquent également un crossover mais néanmoins plus radicale, musicalement et lyriquement. Pour ce qui est de la scène française, L’esprit du Clan avec d’autres groupes comme Martyr, Unfit, Kickback, The Arrs ou encore plus populaire Mass Hysteria sont les acteurs de ce mouvement.
L’esprit du Clan représente un crossover brut, violent et sans concession à l’attitude urbaine assumé.
Masnada
Masnada c’est la formation qui a duré 10 ans et a sorti deux albums et un EP qu’on appelait avant un Maxi. Cette formation, originaire de Lorraine dans l’est de la France, pratique un crossover entre le rap, le métal avec un gros côté musique électronique et une production des plus avant-gardistes.
The Arrs
La formation parisienne fait également dans un Métalcore très mélodieux avec des teintes de rap dans le chant.
Dis l’heure 2 hip-hop rock (le coup raté)
Le rappeur français Passi sera à l’origine de beaucoup de compilations les Dis l’heure (dealer) de Zouk, 2 Rimes, 2 Ragga dance hall et également Dis L’Heure 2 Hip Hop/Rock qui ne rencontre pas vraiment du succès. Les collaborations sur le papier étaient assez originales, Les Wampas – Alibi Montana, Enhancer – Kool Shen, mais sur disque on doit avouer que c’était une catastrophe.
Woodstock ’99
Cette 3e édition de ce festival mythique qui s’est déroulé dans l’état de NY du 22 au 25 juillet 1999 permettra beaucoup de rappeurs comme de partager la scène avec des artistes beaucoup plus populaires. Contrairement à l’édition de 1994, celle-là ne pouvait pas résister à d’une la popularisation du rap grandissante et également celle des groupes crossover. À la volée on y retrouvait ; 3rd Bass, groupe mythique du Queens (NY), ICP, The Roots, DMX, korn, Limp Bizkit, Ice Cube, les canadiens de Serial Joe ect.
Kid Rock
L’artiste de Detroit marque également le festival avec son ROCK/RAP aux teintes country. Kid Rock explose tout aux États-Unis grâce à ce festival et surtout à son album sorti l’année d’avant et intitulé Devil Without a cause. Ce style bluegrass country tinté de rap sera popularisé à la fin des années 2000 par entre autres le groupe Gangstagrass puis au milieu des années 2010 par entre autres Yelawolf mais nous y reviendrons.
À suivre dans la prochaine partie, les années 2000 qui seront décisivent et surprenantes, tout autant pour le sous-genre Néo-métal mais également pour le crossover Rock/Rap en tant que tel….